Dans « Constellation » le violoniste Virgil Boutellis-Taft trace une trajectoire musicale aussi intime qu’universelle. Ce disque, conçu comme une traversée des émotions humaines, assemble notamment des œuvres de Chausson, Bloch, Tchaïkovski, Saint-Saëns, Vitali, Janáček, Hersant et Umebayashi, dans un programme qui refuse les cloisonnements stylistiques pour mieux épouser les contours mouvants de la sensibilité. Dès les premières mesures du « Poème » de Chausson, Boutellis-Taft impose une sonorité ample, vibrante, presque vocale. Le Royal Philharmonic Orchestra, dirigé par Jac van Steen, lui offre un écrin orchestral d’une grande finesse. La « Sonate pour violon et piano » de Janáček, nerveuse et fragmentée, trouve en Guillaume Vincent un partenaire de choix : son jeu incisif et nuancé répond avec justesse aux élans du violoniste. La « Danse macabre » de Saint-Saëns, transcrite pour deux violons avec Irène Duval, devient une joute virtuose et jubilatoire. Mention spéciale à la « Chaconne » de Vitali, où Boutellis-Taft conjugue rigueur baroque et souffle romantique. Ce qui fait la force de « Constellation », c’est sa cohérence poétique. Chaque pièce, aussi contrastée soit-elle, semble répondre à une autre, dans un jeu de miroirs émotionnels. Le titre du disque n’est pas un simple ornement, il traduit une volonté de cartographier les affects, de relier les œuvres comme on relie les étoiles. Avec cet album, Virgil Boutellis-Taft signe un disque à la fois accessible et exigeant, où le violon devient le vecteur d’une quête intérieure.
Jean-Jacques Millo |