"Echos d’Exil" explore les résonances musicales de l’exil à travers cinq œuvres majeures du XXe siècle, entre les années 1920 et 1950, par des compositeurs marqués par ce dernier : George Enescu (1881-1955) avec « Ménétrier » (extrait des Impressions d’enfance, Op. 28). Une évocation nostalgique du violon populaire roumain, pleine de caractère et de couleurs folkloriques. Béla Bartók (1881-1945) et la « Sonate pour violon seul », Sz. 117 / BB 124. Composée en 1944 pour Yehudi Menuhin, cette sonate est un sommet du répertoire moderne, mêlant rigueur formelle et expressivité brute. Paul Ben-Haim (1897-1984) et la « Sonate en sol majeur pour violon seul », Op. 44. Œuvre du compositeur israélien d’origine allemande, elle reflète une synthèse entre tradition occidentale et influences orientales. Bernd Alois Zimmermann (1918-1970) avec la « Sonate pour violon seul » (1951). Une pièce intense et fragmentée, emblématique du langage post-expressionniste allemand. Ainsi que Eugène Ysaÿe (1858-1931) et « Malinconia » (extrait de la Sonate n°2 en la mineur, Op. 27 n°2). Un moment suspendu, empreint de lyrisme sombre, dans le style tardif du maître belge. Ce cinquième album de la violoniste coréenne Sueye Park est un projet profondément personnel et intellectuel, centré sur le thème de l’exil, qu’il soit politique, géographique ou intérieur. Il propose une immersion sonore raffinée dans un répertoire exigeant et rarement entendu en récital solo. La musicienne, déjà saluée, dans nos colonnes, pour ses enregistrements des « Caprices » de Paganini et « Journey through a Century », poursuit ici son exploration du répertoire pour violon seul avec une vision cohérente et engagée. Le fil conducteur de l’exil lui permet de tisser des liens entre des esthétiques très diverses, tout en mettant en lumière la solitude expressive de l’instrument. Un SACD tout simplement passionnant.

Jean-Jacques Millo