À l’occasion du 70e anniversaire du compositeur américain David Conte (né en 1955), le label Pentatone publie sa musique de chambre sous l’intitulé « Intimate Voices », florilège de pièces composées entre 2014 et 2024. Ce disque, se veut une immersion dans l’univers intérieur d’un créateur pour qui la musique de chambre est le lieu privilégié de la confession artistique. Formé auprès de Nadia Boulanger, dont il fut l’un des derniers élèves, Conte revendique une filiation assumée avec les grands maîtres du passé. Mais loin de s’enfermer dans une posture néoclassique, il fait de cette tradition un tremplin vers une expression personnelle, où la rigueur formelle côtoie une sensibilité contemporaine. Le titre même de l’album, « Intimate Voices », évoque cette quête d’un dialogue intérieur, d’une parole musicale qui se murmure plutôt qu’elle ne s’impose. Chaque pièce du programme semble dessiner un autoportrait fragmenté du compositeur. Comme notamment L’Elegy pour Violon et Piano qui ouvre le programme avec une gravité lyrique, portée par le violon de Samuel Vargas et le piano de Kevin Korth, ou l’Aria et Fugue pour violoncelle et Piano, interprétée par Emil Miland et Miles Graber, conjuguant solennité et virtuosité contrapuntique, dans une écriture qui rappelle les grandes pages de Britten ou Barber. La Sonate pour Cor et Piano, confiée à Kevin Rivard et Jerome Simas, explore des couleurs plus pastorales, presque méditatives. Les musiciens réunis pour cet enregistrement sont tous des familiers de l’univers du compositeur. Leur engagement, leur finesse de jeu et leur sens du phrasé contribuent à faire de cet album une référence dans le répertoire chambriste américain contemporain. Le piano, omniprésent, agit comme un catalyseur émotionnel, tantôt soutien discret, tantôt partenaire soliste. C’est une musique de la proximité, de la confidence, où le silence a autant de poids que la note.
Jean-Jacques Millo |